vendredi 23 octobre 2009

loi carle et Mr Debré

A propos de la loi Carle et de déclarations surprenantes
de Mr Jean-Louis Debré
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Deux phrases de la déclaration que Mr Debré aurait prononcée devant le congrès de l'UNETP reprennent deux contre vérités auxquelles cet homme politique n'échappe pas, pas davantage, je le crains, que le Président du Conseil Constitutionnel qu'il est. Ce qui est plus grave.
Ces deux phrases les voici.
"Toute disposition législative qui aurait pour effet de créer un monopole de l'enseignement public porterait atteinte au principe de liberté de l'enseignement"
"Je suis fils de l'enseignement public; j'ai compris à travers l'enseignement de mes maîtres qu'il y avait une liberté à défendre, la liberté de l'enseignement".
Il faut en finir avec ce tour de passe-passe qui octroie à des appétits idéologiques,sociologiques ethniques etc... le label de la "liberté de l'enseignement"
Qu'est-ce que la liberté de l'enseignement, c'est à dire un enseignement libre?
C'est un enseignement à l'abri des tutelles, contraintes doctrinales ou politiques. C'est un enseignement laïque qui forme les esprits et ne les conforme pas .
De ce point de vue, les maîtres de Mr Debré ont défendu la liberté de leur enseignement, dans le droit fil de la lettre de Jules Ferry aux instituteurs. Ceux-ci n'y dérogent pas.
Les adversaires de cette liberté fondamentale lui en ont substitué une autre, celle d'être libre de créer leurs propres établissements privés d'enseignement. Contrairement à ce qu'affirme Mr Debré, la République n'a jamais interdit ni empêché la liberté pour toute personne, religion , mouvement particulier de créer ses propres établissements "libres", donc privés Il n'y a jamais eu, il n'y a pas de monopole ni tentation de vouloir instaurer un monopole. L'affaire a été tranchée en 1905
Les républicains convaincus , comme les défenseurs de la laïcité de l'Etat ont seulement contesté que ces établissements "libres" assurent leur gestion avec l'argent public.
Oserai-je, dans cet esprit, rappeler à Mr Debré cette déclaration de son père- puisqu'il le cite- à la tribune de l'Assemblée avant le vote de la loi qui porte son nom:
"Il n'est pas concevable pour l'avenir de la Nation qu'à côté de l'édifice public de l'Education Nationale, l'Etat participe à l'élaboration d'un autre édifice qui lui serait en quelque sorte concurrent et qui marquerait, pour faire face à une responsabilité fondamentale, la division absolue de l'enseignement en France"
Mille regrets, Mr Michel Debré;.la loi "Carle" est une nouvelle pierre à cet "autre édifice".
Guy Georges 23/10/2009

jeudi 22 octobre 2009

laicité à géométrie variable

Je reviens à l'excellent article de Mr Mounia Bouzar cité dans un précédent message (la burqha, le voile, la république) pour en extraire cette phrase-clé: "Lorsque la religion musulmane est en cause, chacun perd son latin et n'applique plus ses critères de raisonnement habituels".
En témoignent deux attitudes radicalement opposées au sujet de l'islam et qui nous intéressent parce qu'elles prétendent toutes deux se référer à la laïcité. L'une, vieille de 20 ans déjà , initiée par J. Baubérot, reprise par M. Stasi dans son rapport, entend faire à la religion islamique une place égale aux autres dans "l'espace public"; ils ont affublé cette déviation de la laïcité d'épithètes , "ouverte", "apaisée" aujourd'hui "positive". L'autre se prévaut de la laïcité pour demander d'éradiquer carrément l'islam de notre société; cette attitude est exprimée de façon outrancière par un journal "riposte laïque" qui cloue au pilori tout ce qui n'est pas sur sa ligne.La laïcité ne se retrouve dans aucune des deux conceptions. Et c'est créer la confusion à une époque où la laïcité de l'Etat est gravement remise en question. L'histoire montre, le présent confirme les échecs sanglants de ces deux fausses réponses à la diversité de la société humaine. .. Qu'on le veuille ou non, le vrai socle de la laïcité se trouve dans le droit, pour tout citoyen, de croire ou de
ne pas croire, sans jugement de valeur entre les croyances ou convictions , et dans la séparation entre ce droit, d(ordre privé, et l'organisation de la société ou de l'Etat, qui relève de la citoyenneté donc de la loi commune. En d'autres termes, la laïcité exige des particularismes qu'ils s'organisent en fonction de la loi commune et non l'inverse.
Ces principes trouvent leur écho dans l'article 9 de la convention européenne des droits de
l'homme que la France a ratifiée.
On a un peu trop tendance à ne retenir que le premier alinéa qui affirme la liberté de "manifester sa religion ou sa conviction.......en public ou en privé.....". et d'oublier le second alinéa qui énumère les restrictions à cette liberté, " ...qui constituent des mesures nécessaires , dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre.....ou à la protection des droits et libertés d'autrui".
La commission parlementaire qui se préoccupe du port de la burqha serait bien avisée de s'y référer.

mardi 20 octobre 2009

privatiser l'école laïque: méthode et détails

J'évoquais récemment et succinctement l'objectif de la droite cléricale de démanteler l'école laïque. En voici l'illustration.
On sait depuis plusieurs années que tel est l'objectif déclaré (rapport et ouvrage d'Olivier Giscard d'Estaing en 1971- programme RPR de 1984 qui s'en inspire- programme de l'UPF en 1993- de l'UMP en 2007) Tout cela est public; il suffit de s'y reporter. Voir aussi " la bataille de la laïcité 1944/2004" -éditions SUDEL.
Le principe en est simple : faire fonctionner les établissements publics comme les établissements privés: l'Etat les finance; les usagers les gèrent. Pratiquement, l'Etat verse un chèque-éducation pour chaque enfant scolarisable; les parents choisissent un établissement- voire le créent- embauchent un directeur chargé de recruter des enseignants qui seront rémunérés par les gestionnaires et liés par un contrat de travail de statut privé.
Depuis 2007, les inspirateurs du projet sont au pouvoir. L'un de ceux-ci, Mr Philippe Nemo l'a détaillé dans un long document où il entrevoit des écoles créées par affinités des parents et soumises aux lois du marché . Des associations créées dans ce but, comme SOS-Education ont pour rôle de conditionner l'opinion en dénigrant l'enseignement public. L'un des chefs d'orchestre était récemment aux commandes au ministère de l'Education Nationale, Mr Darcos( Se reporter au livre "Main basse sur l'école publique" d'Eddy Khaldi et M. Fitoussi)Rien ne vient aujourd'hui montrer que l'objectif serait abandonné.
La stratégie choisie - ils l'ont écrit- c'est " pas de bouleversements mais des modifications apparemment limitées, voire anodines ou surprenantes, qui , additionnées, transformeront en profondeur l'organisation scolaire.
Ces modifications interviennent dans trois directions :
Désengagement de l'Etat
suppression de postes abondante dans le public, moindre dans le privé dont les taux d'encadrement sont pourtant plus faibles. Et la curée continue en 2010
discrédit des écoles maternelles pour préparer l'installation de "jardins d'éveil" privés ( opération en cours)
étranglement financier des associations éducatives périscolaires
suppression des réseaux de soutien scolaire (RASED), suppression de la classe du samedi tout cela pour laisser le champ libre aux officines privées de "soutien" scolaire
transfert de charges aux collectivités locales
Mise en concurrence des établissements
suppression de la carte scolaire
évaluation des élèves.C'est une partie des obligations d'un enseignant. Pourquoi en faire une compétition publique sinon pour cibler les écoles "performantes".
transformation des écoles en "établissements publics d'enseignement public", réseaux gérés comme des entreprises
récente loi Carle qui ouvre la voie au chèque-éducation et menace l'existence de nombre d'écoles rurales
et bien sûr le décret Koutchner supprimant le monopole d'Etat sur la délivrance des diplômes d'enseignement supérieur.. Aujourd'hui le Vatican; demain toute officine pourra délivrer ses propres baccalauréats-maison.?...
Mise au pas des enseignants
service minimum
nouvelle échelle de traitement des directeurs des "établissements publics"
recrutement temporaire par une agence de remplacement (site ANPE) de personnes chargées d'"enseigner" pendant de courtes périodes au tarif du SMIC
surveillance et fichage par appel d'offre à une entreprise privée pour notamment "repérer les leaders d'opinion"
Deux conclusions
L'une, empruntée à un élu local, maire et conseiller général: " Tous les élus républicains doivent avoir conscience de cette politique scolaire fondée sur la concurrence entre les collectivités,entre les élèves, entre les familles,entre les écoles et entre les enseignants."
L'autre est la leçon à tirer du récent débat qui a conduit les députés de droite à voter la loi Carle venant s'ajouter à la panoplie des lois anti-laïques
L'appétit de cette droite cléricale est insatiable. Ils exploitent la moindre imprudence, la moindre faiblesse. Ils l'ont toujours fait; rappelez-vous les conditions du vote de la premiére de ces lois, la loi Barangé.
Il faut leur opposer la rigueur des principes et des valeurs de la République laïque et démocratique. Sans concession aucune.

dimanche 18 octobre 2009

la laïcité n'est pas réductible au seul périmètre scolaire

On a tendance à réduire la question laïque au seul terrain de l'enseignement. La raison est évidente. La conception et l'organisation de l'enseignement sont révélateurs de l'évolution d'une société selon qu'elle tend vers la démocratie ou s'en éloigne.
"La démocratie,c'est l'égalité des droits" disait le conventionnel Royer-Collard en 1792. Hugo, Jaurès ne disaient rien d'autre. L'égalité des droits est garantie par les services publics qui répondent aux besoins essentiels des personnes, éducation, santé, justice, sécurité entre autres. Les attaquer, c'est anéantir peu à peu la charpente démocratique de la société.
L'enseignement a toujours été l'élément précurseur de l'évolution vers le progrès ou la régression.Les dictatures le savent bien
Quelques rappels....
L'article 1 de la déclaration des droits de l'homme déclare que les humains sont libres et égaux? C'est par l'enseignement que Condorcet propose une "éducation aussi égale, aussi universelle , aussi complète que les circonstances le permettent",dans des "établissements indépendants de toute autorité politique", "n'admettant dans l'instruction publique l'enseignement d'aucun culte religieux" . Cette école s'organise à peine que le Premier Consul Bonaparte signe avec le Vatican un concordat qui partage l'enseignement entre l'Eglise catholique et ce qui va devenir l'Empire
Un des premiers actes de la II ème République, en 1848, est de reprendre le projet de Condorcet et organiser un enseignement gratuit et laïque. Deux ans après, un des premiers actes de la Chambre des députés, monarchistes et bonapartistes étant largement majoritaires, est,avec la loi Falloux, de remettre l'enseignement de la jeunesse sous le joug de l'Eglise catholique. Cette tutelle s'exercera jusqu' à la victoire électorale des républicains à partir de 1979. La série de lois des années 1880 organise à nouveau l'enseignement laïque, ouvert à tous les enfants,à égalité de droits. Elles précèdent la grande loi de 1905 qui fonde dans la légalité les principes de la démocratie républicaine. La droite cléricale et l'Eglise catholique n'auront de cesse de l'attaquer. C'est en pleine débâcle, le 12 juillet 1940 que Pétain donnera satisfaction au Cardinal Gerlier en ouvrant la voie à la concurrence scolaire alors qu'en même temps, le régime de l'Etat français va tenter de réduire l'enseignement public. Cette politique visant à réduire la laïcité de l'enseignement de la jeunesse sera poursuivi sans relâche depuis 1944 par les partis de droite,MRP et Gaullisme, conjuguant la réduction des moyens de fonctionnement de l'école laïque et les largesses de l'Etat aux établissements privés, accompagnant cette concurrence inégale de campagnes calomnieuses contre l'école laïque
Depuis peu, le Pouvoir en place prépare la privatisation de l'enseignement public par touches apparemment anodines mais qui convergent toutes vers ce même objectif.
Inégalité devant l'enseignement; inégalité sociale; c'est bien la vie démocratique qui est en jeu. Et comme toujours, c'est par l'enseignement que la brèche est ouverte

Après le colloque Laïcité 2010 du 10 octobre

Vous pouvez entendre les présentations des intervenants lors du colloque du 10 octobre 2009 sur le blog suivant:

http://paul.quiles.over.blog.com

mardi 13 octobre 2009

Club Gauche Avenir


Manifeste du 10 octobre 2009


Le 9 décembre 1905, les représentants du peuple inscrivaient dans la loi les principes indéfectibles de la laïcité, valeur universelle d'unité, de liberté, d'égalité, de concorde et pierre angulaire de la République
Par son article 1er, la loi proclamait la liberté de conscience, le droit de croire ou de ne pas croire, et le libre exercice des cultes. De ce fait, la laïcité n'est pas hostile aux religions, contrairement à une contre-vérité courante.
Par son article 2, elle proclamait l'indépendance réciproque de l'Etat et des cultes. De ce fait, elle s'opposait au cléricalisme, c’est à dire l'intrusion d'autorités religieuses dans la vie politique et les lois de l'Etat. En stipulant que « la République ne reconnaît ni ne salarie aucun culte », elle posait comme un principe l’universalité de son orientation, condition de l’égalité de traitement de tous les citoyens, qu’ils croient en Dieu ou non.
Aujourd'hui, la laïcité est bafouée par les agissements et les intentions déclarées des plus hautes autorités de l'Etat. La République est fragilisée par la progression du communautarisme social, ethnique, religieux, qui divise de plus en plus la société. Elle subit de plus en plus fortement les pressions d'un cléricalisme renaissant, qui s'installe dans l'Union Européenne et en particulier en France, comme en témoigne la récente violation du Code de l’éducation, qui confie la délivrance des diplômes universitaires au seul Enseignement Supérieur Public.
Gauche Avenir dénonce ce recul de plus d'un siècle et souhaite le réveil des consciences, pour que renaisse la République indivisible, laïque, démocratique et sociale.
Ce 10 octobre 2009, nous appelons à un réengagement de toutes les forces laïques et à leur conjonction dans une structure de coordination, à l’image de ce que représenta le CNAL dans l’enseignement, afin de redonner corps et vigueur à l'idéal laïque.
Nous appelons les partis politiques qui se réclament de cet idéal à s'opposer résolument à toute tentative de modifier la loi du 9 décembre 1905, à inscrire dans leur programme les mesures nécessaires à cette renaissance et à s'engager solennellement à les appliquer, le moment venu, notamment :
Ø réhabiliter dans ses applications l'article 2 de la loi de 1905 et, en conséquence, s'engager à légiférer dans le sens d'un retour à l'autofinancement des établissements privés d’enseignement ;
Ø s'opposer à l'intrusion à tous les niveaux (mondial, européen, national) des pouvoirs religieux dans l'élaboration des lois régissant la vie civile et œuvrer à la création d’une « organisation mondiale de la laïcité », à l’image de l’ «Organisation internationale de la francophonie », appelée à intervenir à l’ONU, dans les instances européennes ;
Ø stopper la désorganisation des services publics et leur mise en concurrence, notamment dans l'éducation, la santé, la recherche scientifique ;
Ø renforcer au contraire les services publics par l’élaboration d’une « charte des services publics », garantissant leur indépendance vis-à-vis des pouvoirs politiques, religieux, économiques, charte que devrait signer tout postulant à un emploi de la Fonction Publique ;
Ø développer l’enseignement à l’école de la laïcité et notamment de la loi de 1905.