samedi 28 août 2010

Comment l'Etat a organisé le communautarisme

Lors de la discussion de la loi Debré, son auteur et rapporteur, Michel Debré, alors Premier Ministre, déclarait:"C'est une chimère dangereuse que celle qui conçoit, par l'association de droit de tous les établissements privés...la constitution d'une sorte d'université nationale concurrente que l'Etat accepterait de considérer dans son unité, avec laquelle il traiterait sinon d'égal à égal en tout cas comme un vaste corps intermédiaire". "Apprenti-sorcier" s'était exclamé un député socialiste. Celui-ci avait raison. Le Conseil Constitutionnel, présidé par M. Debré fils, a entériné la parité entre enseignement public et enseignement privé, dont le plus important se comporte en effet comme une "université nationnale concurrente"..Mais elle n'est plus seule..
Voici des statistiques officielles récentes ( 2008) sur la répartition des établissements privés d'enseignement, premier et second degré:
-catholiques 8 200 établissements pour 1 961 037 élèves
-juifs 256 " pour 38 000 élèves (32 000 en 2002)
-protestants 8 " pour 2 760 élèves
-breton diwan 44 " pour 3 076 élèves
-breton catholique82 " pour 4 241 élèves
-basques 26 pour 2 508 élèves
occitans 50 " pour 1 627 élèves
-catalans 8 " pour 600 élèves
Tous ces établissements sont sous contrat, c'est à dire qu'ils fonctionnent avec un financement public au même titre que l'école de la République et même avec quelques faveurs... On observe que le particularisme religieux n'est plus seul; le régionalisme tient une place de plus en plus importante. Il n'y a pas de raison que l'évolution s'infléchisse...
Poursuivons. Il y a des établissements hors contrat, mais qui espèrent passer contrat avec l'Etat dès que les délais seront atteints..5 établissements musulmans, un établissement shik, 30 établissements protestants évangélistes....600 établissements (25 000 élèves) du mouvement "Créer son école"
Deux observations...Le lycée musulman Al Khindy de Lyon, qui presse l'Etat de lui accorder un financement public, inculque à ses adolescents, en vertu du caractère propre que lui reconnaît la loi, des principes de vie rigoureusement islamiques..Ainsi l'Etat finance une éducation que par ailleurs il veut éradiquer..
Un mot sur ces 600 établissements du mouvement "Créer son école". Ce mouvement très lié à des personnalités marquantes de droite et inspiré par le club de l'Horloge, partage son activité entre le dénigrement de l'enseignement public et l'invitation aux parents de créer leur école privée, selon des critères sociaux, professionnels,voire politiques ,si on lit attentivement leurs idéologues. Quand, "innocemment", M. Chatel avance que les parents d'élèves d'une école publique pourraient embaucher un directeur qui lui-même embaucherait ses adjoints, c'est un pas vers cet objectif; c'est d'ailleurs l'application du programme de l'UMP.
Voilà comment s'organise patiemment le communautarisme, c'est à dire l'éclatement de la Nation , dès l'enfance, en groupes soit religieux, soit régionalistes, soit d'homogénéité sociale, professionnelle et même, osent-ils, politique!!!
La liberté de créer sa propre école est inscrite dans la loi...Chacun est libre d'en bénéfiier. Ce qui est inadmissible, c'est que l'Etat, vous et moi ,par notre impôt, financions ce genre d'établissements et contribuions à cet éclatement entre groupements divers qui ont toute raison de se multiplier.
Ce financement est un privilège. La liberté de créer sa propre école, qu'on nomme liberté de l'enseignement,est la seule liberté ainsi financée..Pourquoi ne pas financer le fonctionnement des associations , au nom de la liberté d'association? De la presse au nom de la liberté de la presse( la presse vraiment libre n'est pas subventionnée)? Des cultes au nom de la liberté des cultes?...
Sont incompatibles le financement public d'un établissement et son caractère propre...C'est effectivement "une chimère dangereuse"

samedi 14 août 2010

Sarkozy et la République

N'est-il pas à la fois sommaire et excessif de voir dans le locataire actuel de l'Elysée un "voyou" selon l'hebdomadaire "Marianne", un homme ambitieux qui aurait créé un nouveau mouvement, le sarkozysme?
N'est-il pas plutôt le "tambour-major" ,claironnant des idées et objectifs dont on suit aisément le cheminement depuis Maurras à Le Pen en passant par l'épisode du régime de Vichy
Ne s'agit-il pas, en fait, de reprendre avec un glacial entêtement ce rève de l'extrème droite, éliminer cette République qui , par la Constitution de 1946, confirmée en 1959,voulait effacer quatre années d'un Etat dont l'immense satisfaction, exprimée dès juillet 1940 par la voix du général Weygand, était d'avoir "supprimé enfin la république"?

L'article 1er du Préambule de la Constitution est ainsi rédigé:
"La France est une République indivisible,laïque, démocratique et sociale.Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race, de religion. Elle respecte toutes les croyances"
A l'évidence, par l'enchaînement de ces trois phrases, l'égalité est la condition nécssaire de la laÏcité, de la démocratie et de la justice sociale.

C'est bien à ce principe d'égalité que s'attaquent, avec cynisme, M. Sarkozy et ses affidés
Ce n'est pas un hasard si le premier objectif a été l'école laïque, symbole et réalité de la première égalité, celle devant l'instruction.Systématiquement, dans l'histoire, ce terrain a été précurseur de bouleversements politiques et sociaux. Le démantèlement des services publics s'explique ainsi.
Les projets exposés à Grenoble sont de même inspiration

M. Sarkozy ne l'a pas caché; ^pour lui, "l'égalité est contraire à la liberté"...C'était à St Quentin, fin mars 2009..Il entend donc construire sans entrave ce monde partagé entre ceux qui commandent ( par l'argent, par le copinage, par les mises au pas, par la crainte..) et ceux qui doivent obéir ( les "mauvais esprits", les "pas comme les autres", les "casse-toi"..) en un mot les perdants
Il faut donc supprimer cette entrave qu'est l'égalité
Ce n'est pas une idéologie nouvelle. Elle est vieille comme le monde. Elle a fait et fait toujours- hélas-ses preuves
Il y a exactement un siècle, Jean Jaurès le clamait à la tribune de l'Assemblée :"démocratie et laïcité sont inséparables"
C'était le rappel d'une victoire difficilement acquise. Aujourd'hui, ce sont ces principes, malmenés, qu'il faut défendre
La manifestation du 4 septembre, initiée par la Ligue des Droits de l'Homme, la pétition lancée par Olivier Duhamel, la plantation de "l'arbre de la laïcité" le 11 décembre, proposée par le club Gauche Avenir, posent pertinemment cet enjeu
Il est urgent que les partis qui se réclament des idéaux démocratiques proposent aussi ce choix fondamental à l'opinion